Je nourris souvent l'envie de contempler celui qui, chaque jour, se tient debout devant son chevalet, absorbé par son travail, sans avoir à planifier en amont les tâches nécessaires et peu captivantes qui lui incombent.

De mon côté, lorsque je m'apprête à créer sur une toile, je laisse tout le reste derrière moi. Je suis saisi par une multitude de réactions contradictoires et embarrassantes, suspendues dans le temps, loin de mes impératifs quotidiens. Je recherche cette perte de repères et de temporalité qui me permet de m'abandonner totalement au mouvement des pinceaux, des tubes et des mélanges. Pour moi, peindre est semblable à l'écriture d'un texte, sauf que ma palette de couleurs devient mon clavier, où chaque touche de couleur est un accent, où chaque rehaut de lumière est une ponctuation, enfin je m'expose à lire nu et fragile aux remarques.

Il est parfois difficile de se laisser observer en pleine création. Lorsque je présente mes tableaux pour la première fois, je suis à la fois inquiet, impatient, enthousiaste et avide d'entendres, toutes les critiques et les compliments du public ou des collectionneurs.

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